Droit international privé
Professeur Caroline Kleiner
Qu’est-ce que le droit international privé ?
Chaque Etat régit ses règles (de propriété par exemple). Il est des marchands malins qui
peuvent contourner ces règles qui, dans un pays, peuvent être plus arrangeantes pour eux, et
essayent donc d’avoir l’application du droit d’un autre Etat qui peut lui être plus favorable.
Parce que chaque Etat a sa propre loi, dès lors que l’échange est international, va se poser
une question : selon quel droit l’échange a lieu, quelle règle faut-il suivre dès lors qu’on échange est
localisé sur plusieurs Etats ? l’un des aspects du DIP est d’appréhender les relations privées,
internationales. Déterminer comment les régir.
Imaginons des couples transfrontaliers, un français qui épouse une allemande. Selon quelle
loi le mariage peut-il être validé ? Loi allemande, française ? Ce sont tout ce genre de relations
privées, qui ne se déroule pas avec un seul Etat, qui font l’objet du champ du DIP.
Il faut ainsi se poser qques questions, même remettre en cause certains préjugés qu’on peut
avoir, suite à nos premières études de droit.
Est-ce qu’un juge français peut juger des litiges dont une partie (ou toutes) est étrangère ou
réside à l’étranger ?
Il n’y a pas d’obstacle majeur aujourd’hui. Mais pendant un certain temps, la nationalité
étrangère d’une partie était un obstacle pour le juge français, mais aujourd’hui, c’est un fait acquis.
Comment justifier sa compétence ?
Si un accident se produit en France, on a un fait dommageable en France. Donc il faut
toujours justifier de la compétence du juge, car pas de compétence universelle. On applique le chef de
compétence aux juridictions françaises.
Le juge français applique-t-il toujours la loi française ?
Non pas toujours, il peut être amené à appliquer une loi étrangère. Il faut voir dans
quelles conditions il doit appliquer la loi ou une autre loi étrangère.
Peut-on exécuter un jugement étranger sur le territoire français ?
En France, on peut exécuter une décision étrangère (jugement rendu par un juge
étranger) mais la question qui se pose est, à quelle condition ?
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, Les grandes questions qui vont nous préoccuper sont le cœur du DIP :
- la compétence internationale des juridictions françaises
- les effets des décisions étrangères
- comment déterminer le droit ou loi applicable
Ces trois questions sont liées entre elles, mais il est important de bien connaître et
comprendre la distinction car le type de normes qu’on va appliquer en DIP pour résoudre
chacune de ces questions est différent, et donc la méthode employée en DIP pour les
résoudre va être différente.
Chaque Etat n’a pas la même vision et dimension du DIP, par exemple en
Allemagne, en DIP seule la question du droit applicable préoccupait les allemands.
Maintenant, il y a un consensus qui dit que ces 3 questions appartiennent au DIP mais cela
n’a pas toujours été le cas.
En Suisse, si on lit l’art. 1 de la loi suisse du DIP (LDIP), on retrouve la compétence
des autorités, le droit applicable, et les conditions de la reconnaissance et de l’exécution des
décisions étrangères (les 3 questions du DIP) mais pas seulement, l’art. ajoute la faillite et le
concordat, ainsi que l’arbitrage = autre vision du contour du DIP.
En France, en réalité sont traditionnellement rattachées 2 autres questions (qu’on ne
verra pas dans le cours)
- La question de la nationalité, càd à quelles conditions une personne peut devenir française
- et la question de la condition des étrangers
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, La finalité du DIP, c’est de gérer la présence ou d’un élément d’extranéité, càd
savoir se poser les bonnes questions lorsqu’on est confronté à une relation internationale,
càd qui concerne plus qu’un Etat.
Quelques citations
Phocion Francescakis : la finalité du DIP est la « gestion du pluralisme juridique »,
gérer le fait que chaque Etat a son propre droit et que dans les relations internationales, il
faut gérer ce pluralisme juridique.
Jean Paulin Niboyet lui disait que le DIP c’est « résoudre les difficultés qui résultent
du phénomène de la frontière ».
Henri Battiffol nous disait que la finalité du DIP c’est la « coordination des systèmes
».
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, INTRODUCTION
I. Objet du droit international privé : les relations internationales de nature privée
Objet du DIP = les relations internationales de nature privée. Il faut étudier les deux
adjectifs : international et privé.
A. Un droit « international » : les rapports entre droit international privé et droit
international public
Il est intéressant de délimiter le DIP (relations entre Etats) et le DIp (entre personnes privées).
Il y a quelques siècles, il n’y avait qu’un droit international, c’était le droit entre les nations, et
la source du DIP a pour origine le droit international. Au 18e - 19e, le droit international s’est privatisé,
on a commencé à considérer les échanges transfrontaliers, alors pas aussi importants qu’aujourd’hui.
Le droit international avait une réglementation entre les rapports privés, et comme cette
réglementation venait des prérogatives d’un souverain, on a élargi le concept de droit international
aussi aux aspects privés.
Mais aujourd’hui, il faut être attentif de l’existence d’un courant universaliste, qui
exprime l’idée qu’en réalité, le DIP est en quête de solutions communes, càd à partager entre tous les
Etats, le but ultime étant qu’il n’existe qu’un droit international privé pour tous les Etats = mais quête
quasi veine.
Il existe un courant opposé, le courant particulariste, qui insiste sur l’aspect particulier, càd
national, du DIPr. On insiste sur le fait que chaque Etat adopte sa propre solution et qu’il n’y a pas
d’universalité.
Aujourd’hui les 2 matières se distinguent assez bien. Néanmoins on peut voir un
certain rapprochement entre ces deux disciplines, d’abord parce que le DIPr traite de plus en plus
de matières relevant du droit public, économique (droit de la concurrence par exemple). Il est illusoire
de penser qu’il n’y a que des relations purement privées. Les raisonnements utilisés en DIP peuvent
faire penser à ceux utilisés en DIPublic. Exemple : en cas de conflit de convention internationale,
l’idée générale est d’appliquer la convention qui impliquerait le moins de sacrifice des Etats. Cette idée
de moins de sacrifice entre les conventions, c’est une théorie qu’on peut trouver en DIP mais avec les
lois.
Par ses sources, le DIPr se rapproche de plus en plus DIPublic, car il est de moins en
moins national. En effet, il traite de questions de plus en plus proches de celles du DIPublic
aujourd’hui la frontière n’est plus si franche qu’elle a pu l’être il y a une 50aine d’années.
B. Un droit « privé » des relations internationales : les rapports entre le droit international privé et
le droit privé interne
L’ordre des mots, DIP et non DPI a un sens. Le DIP traite des relations privées comme le fait
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