Histoire des idées politiques 2
Introduction
La fin du XVIIe siècle marque la fin de l’idéologie absolutiste, c'est-à-dire, la concentration de
l’intégralité des pouvoirs. On arrive à la contestation du modèle absolutiste par la tradition
libérale, les idées libérales et notamment celles de Locke vont prospérer au XVIIIe siècle, avec
notamment, la liberté des sujets à l’égard du pouvoir. Cela heurte totalement le modèle
absolutiste dans lequel il n’y a aucune limite juridique au pouvoir.
On observe la poursuite de la contestation du modèle de l’ancien régime. Cette contestation sera
illustrée par Montesquieu, Rousseau et Sieyès. Les idées concernent le modèle politique, la
forme politique. On s’intéresse à l’origine du pouvoir et à la forme de pouvoir vers laquelle on
doit s’orienter, les auteurs ont tous un projet institutionnel. Au XVIIIe siècle on aura un
basculement avec la pensée socialiste, avec l’apparition des théories contestataires s’intéressant
à la société par le régime et la répartition des biens. Le trait marquant de ces théories est qu’elles
défendent l’évolution, il y a un projet de transformation, un constat qui est le caractère
insatisfaisant du modèle politique ou social et donc une alternative est proposée.
Titre 1. La pensée politique à la veille de la révolution française
Le XVIIIe siècle voit le mouvement intellectuel prendre une ampleur considérable. Il y a une
diffusion des idées sans précédent, c’est le siècle des Lumières. Ce mouvement a pour projet
d’émanciper les Hommes à travers la connaissance et particulièrement le savoir rationnel. Tout
est passé au filtre de la raison et rien n’est considéré comme admis, surtout pas les dogmes
religieux. On entend tout remettre en cause et tout refonder avec comme seul critère celui de la
raison.
La philosophie des Lumières va prétendre refonder l’édifice social et politique en rejetant la
superstition et l’irrationnel du système ancien. Ce grand mouvement aboutira en France à la
Révolution et à la diffusion d’un modèle politique et social dans toute l’Europe occidentale. On
reprochera à la révolution française d’être faite par des théoriciens et d’avoir forcé le monde à
coller à la théorie.
Chapitre 1 : Le libéralisme aristocratique de Montesquieu,
« De l’esprit des lois » (1748)
Montesquieu est considéré comme le théoricien de la séparation des pouvoirs. Il est né en 1689,
c’est un juriste issu d’une famille noble. Il va succéder à son père en tant que Président au
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,Parlement de Bordeaux, succession héréditaire à l’époque. Il va se mettre à étudier et à écrire et
lire des ouvrages contestataires.
Montesquieu écrit une théorie contestataire de la monarchie absolue donc, du régime en vigueur
à son époque. Depuis la fin du Moyen-âge ce système est contesté. Les nobles entendent
participer, avec le roi, au gouvernement du royaume. De ce point de vue, le modèle anglais est
intéressant puisque la monarchie anglaise, depuis la fin du Moyen-âge est traversée par les
mêmes tensions à la différence que, la noblesse a réussie.
Montesquieu prétend fonder sa théorie et ses idées politiques sur la raison, même s’il accorde
une place à l’observation. Le résultat de toute sa théorie sera l’ouvrage « De l’esprit des lois ».
C’est un ouvrage déroutant en sa forme, car il n’a pas de construction logique apparente. Il est
étrange dans une perspective contemporaine, on ne trouve pas de conclusion par exemple. Cet
ouvrage aura un double intérêt :
- Il y a un déplacement méthodologique : on part de l’observation pour tirer des lois
générales. Le projet de l’ouvrage est d’expliquer l’origine et la diversité des lois. Il le fait
par des facteurs historiques, sociaux, géographiques, climatiques, … Il analyse les
institutions, le régime de la propriété, les règles de mariage, la dimension religieuse, …
- Il y a la défense d’un modèle politique qui s’inspire du modèle anglais : c’est le modèle du
libéralisme aristocratique. Il accorde un rôle prépondérant aux nobles. C’est un
libéralisme car il réclame ce changement au nom des libertés politiques.
Section 1 : L’origine et la diversité des lois
Les lois sont entendues très largement. Ce sont les rapports nécessaires qui dérivent de la nature
des choses. Montesquieu ne méconnait pas la loi positive, celle prise par le législateur, mais il
donne une définition des lois physiques. Pour lui le monde physique, comme les sociétés
humaines, répondent à des lois qui ont des rapports nécessaires entre elles.
Montesquieu entend découvrir comment s’articule les lois, cela ne veut pas dire pour autant qu’il
reconnaisse une valeur absolue aux lois positives, il ne dit pas que la loi positive est
nécessairement bonne, mais selon lui, une bonne loi répond nécessairement à certains critères.
En fonction du type de société, du climat, de la situation géographique, il y a des lois qui
correspondent à un type de société.
Il ne s’intéresse pas à l’origine de la société ni à l’état de nature, on ne retrouve pas de contrat
social chez lui. Il y a une petite allusion à l’état de nature, l’Homme serait plus craintif que
guerrier et on serait sorti de cet état de nature en raison de la faiblesse de l’Homme. Si l’Homme
se regroupe c’est donc en raison de ses besoins. Ce qui intéresse Montesquieu, se sont les lois
positives. Il explique que ces lois sont diverses. Il y a une loi adaptée à chaque peuple. Les lois
doivent être propres à chaque peuple en fonction de son système politique, de ses
caractéristiques politiques, des relations de commerces, de la religion, du climat, C’est donc en
fonction de tous ces déterminismes qu’il y aura une loi adaptée.
Section 2. La nature et le principe des gouvernements
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,Montesquieu va dresser une typologie des régimes politiques, on entend « gouvernement » au
sens de régime politique. Ce qu’il appelle nature d’un gouvernement c’est ce que l’on appelle la
forme juridique, la manière dont les institutions sont organisées. Il y a trois espèces de
gouvernement :
- Le régime républicain : ce sont les gouvernements collectifs. S’il s’agit de l’intégralité du
peuple c’est une démocratie et s’il s’agit d’une partie du peuple, c’est une aristocratie.
- Le régime monarchique
- Le régime despotique
La différence entre la monarchie et le despotisme est que, dans la monarchie le roi respecte les
lois alors que dans le gouvernement despotique il n’y a ni lois ni règles.
Montesquieu va distinguer la forme des gouvernements de leur principe. La nature est la forme
juridique et le principe est ce qui le fait agir. Le principe est, ce qui doit être le moteur de l’action
des gouvernements, c’est ce qui permet à un régime de se maintenir.
I) Le régime républicain
Il commence par le gouvernement démocratique. Dans un Etat populaire, il faut le principe de la
vertu. Faute de vertu l’Etat est perdu. Il définit la vertu dans l’état politique. Il explique que, la
vertu dans une République est une chose très simple, c’est l’amour de la République. Cela signifie
que c’est la conscience de la prévalence de l’intérêt public sur l’intérêt privé. La vertu est le
principe même du régime républicain et surtout de la démocratie car il faut que tous soient
attachés à la conservation du régime politique car tous possèdent le pouvoir. Si cet amour
disparait le régime s’effondre.
II) La monarchie
La vertu n’est pas le principe du gouvernement monarchique. L’Etat subsiste indépendamment
de l’amour pour la patrie. Il est totalement scandaleux d’écrire cela à l’époque. Ce que l’on
appelle vertu, de manière habituelle à cette époque, ce sont les qualités internes des individus
envers la morale. Or, le cœur des théories absolutistes est de dire qu’il n’y a pas de limite
juridique au pouvoir, mais il n’est pas tyrannique car le pouvoir est nécessairement vertueux
dans son essence. Donc, écrire que la vertu n’est pas le principe du gouvernement monarchique
est très contestataire, mais Montesquieu entend la vertu non pas au sens de morale, mais au sens
de l’amour de la patrie.
Des lois permettent de contraindre les citoyens à agir d’une telle manière donc il n’y a pas besoin
de vertu. Le principe du gouvernement monarchique est l’honneur. Il va faire un éloge de la
noblesse. Il va insister sur la nécessité des corps intermédiaires. L’honneur est la structure
inégalitaire de la société. Certains ont des positions plus éminentes dans la société et ont des
droits supérieurs à d’autres. En quoi cela permet au régime monarchique de se maintenir ? Parce
que c’est le roi qui dispense ces statuts particuliers. Cela permet de provoquer l’attachement au
régime car chacun est en mesure d’attendre un privilège, une préférence de la part du roi.
L’intérêt de la noblesse est d’éviter à la monarchie de passer dans un état despotique. Dans un
état despotique il n’y a pas de corps intermédiaire, il y a un monarque qui exerce un pouvoir égal
sur tous les Hommes qui sont ses esclaves. Ce qui permet d’éviter le despotisme c’est de placer
un intermédiaire entre le Roi et le peuple.
III) L’état despotique
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, La tyrannie ou l’état despotique n’est pas une dégénérescence de la monarchie. Le principe de
l’état despotique est la crainte. La vertu n’est pas nécessaire et l’honneur serait dangereux dans
un état despotique. Si le despote ne maintient pas son peuple dans la crainte le régime
s’effondre. Montesquieu sait bien que ces principes ne sont pas toujours respectés sinon il n’y
aurait pas de changement de régime politique. Les lois que l’on se donne, sont déterminées par
le régime politique. Si l’on veut un régime politique fondé sur la crainte il faut enseigner la
crainte du despote aux enfants par exemple. Tout est à l’avenant.
Section 3. La préservation de la liberté politique
Montesquieu essaye de voir de quelle manière les lois qui préservent la liberté politique sont en
lien avec la forme du gouvernement.
I. La définition de la liberté politique
La liberté pour Montesquieu ce n’est pas l’indépendance et la possibilité de faire ce que l’on veut.
La liberté est le droit de faire tout ce que les lois permettent. La liberté est bornée par des lois
mais, d’un autre coté c’est un facteur de modération du pouvoir. Elle implique donc des
protections contre les abus de pouvoir. Il faudra voir quel système politique permet d’avoir un
pouvoir modéré. C’est en cela que l’on peut qualifier Montesquieu de libéral.
II. La détermination du meilleur régime politique
Comment déterminer le meilleur régime politique et comment s’assurer de la modération du
régime ? Pour qu’on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que par la disposition des choses, que le
pouvoir, arrête le pouvoir. Il faut un agencement juridictionnel. C’est aussi en cela que
Montesquieu est un libéral. Il faut des limites juridiques au pouvoir. Montesquieu s’inspire
directement de Locke, pour lui, le seul régime politique à même de permettre cela est la
monarchie, mais il ne promeut pas la monarchie absolue il promeut la monarchie avec un
partage du pouvoir afin que « le pouvoir arrête le pouvoir »
Il est en rupture avec la tradition monarchique française car insiste sur les garanties
institutionnelles.
Le chapitre VI du livre XI est consacré à la constitution d’Angleterre, inspiré de John Locke. Il va
reprendre l’ide de séparation des pouvoir en y ajoutant un éloge de la noblesse dans le
fonctionnement de la monarchie.
3 sortes de pouvoirs :
- Puissance législative : pouvoir de faire la loi, édicter des normes.
- Puissance exécutrice des choses dépendant du droit des gens : càd le droit international
(à partir du 17 s) = les relations internationales
- Puissance exécutrice de celles qui dépendent du droit civil : la puissance de juger. Mais
Montesquieu ne revoie pas au travail des juges (autorité judiciaire)
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