« Vers la territorialisation des sources du droit du Ve au Xe siècle. »
«Sub qua lege vivis?» (Sous quelle loi vis-tu?). Cette question, très
représentative de la personnalité des lois, était jadis posée aux citoyens de
l’Empire Romain a n de déterminer quelle loi leur était applicable.
Les individus suivaient jusqu’alors la loi de leur ethnie: leurs origines
déterminaient quelle loi était la leur.
Mais ce système change à l’avènement de Pépin le Bref qui marque le début de
la dynastie carolingienne. Apparaît alors un système de territorialité du droit.
Les citoyens suivent les lois qui s’appliquent au territoire sur lequel ils vivent,
quelles que soient leurs origines: le champs d’application du droit est délimité
dans l’espace.
La notion de Droit est dé nie comme l'ensemble des règles qui régissent la
conduite des hommes et des femmes en société. Tout ce qui a contribué, et
contribue encore, à créer l'ensemble de ces règles juridiques applicables est
appelé source du droit.
Bien que la loi soit une des plus importantes sources du droit, et cela déjà au
début du Moyen-Age, elle n’est pas la seule. Le droit canonique ainsi que la
coutume prendront une place essentielle à cette période qui s’est cependant
tarie avec le temps.
C’est d’ailleurs au Moyen-Age, plus précisément entre le Ve et le Xe siècle,
que s’opère ce changement de système juridique puisque c'est la chute de
l’Empire Romain d’Occident (476) qui entraîne l’invasion sur ce territoire de
peuples barbares qui vont se juxtaposer, entrainant un pluralisme juridique.
L’élection de Hugues Capet, en 987, marque l’avènement d’une dynastie nouvelle
qui con rme l’ancrage de la territorialité du droit dans les usages de l’époque.
Il apparaît alors une question: comment s’est opéré ce changement?
Autrement dit, comment sommes-nous passé d’un système de personnalité des
lois au Ve siècle à un système de territorialité du droit au Xe siècle?
Il apparaît que cette territorialité du droit a vu le jour à travers la quête
d’unité du peuple (I) puis à travers l’importance croissante du « sol » (II).
I) La quête d’unité
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, En 476, la chute de l’Empire Romain d’Occident entraine donc une invasion
des peuples barbares. Ces peuples, d’abords séparés par leur origines (A) vont
ensuite s’unir sur le plan religieux ainsi que sur le plan juridique (B).
A) Une population divisée
En effet, l’Empire Romain d’Occident, à sa chute, subit l’invasion de
peuples germaniques.
Comme le montre le document 9, la Gaule, comme l’ensemble du territoire de
l’ancien Empire, est envahie par différents peuples: les Francs, les Wisigoths, les
Burgondes, les Ostrogoths mais aussi les Vandales, les Alains, les Suèves…
L’installation de ces populations qui se juxtaposent conduit à une modi cation
lente des sources du droit. Les barbares apportent avec eux un droit spéci que
et un ensemble de coutumes qu’ils souhaitent conserver et qui s’additionnent au
droit romain.
Chacun obéit donc au droit ethnique auquel il appartient. Ceci est d’ailleurs
illustré par la loi ripuaire (document 11) où il est écrit que « quelle que soit la
nationalité de celui qui est appelé en jugement, qu'il réponde selon les
prescriptions de la loi du lieu où il est né » (XXXV-3).
Chaque royaume établit des lois différentes selon l’ethnie de ses sujets:
certaines lois s’adressent aux sujets romains du royaume (c'est le cas du bréviaire
d’Alaric ou de l’édit de Théodoric) et d’autres s’adressent aux sujets barbares
(c'est le cas de la loi gombette ou de la loi salique).
Dans cette dernière (document 10) il apparaît qu’il est fait une distinction entre
les individus en fonction de leur ethnie: « Si un Franc » (Titre XXIX-5) ou « Si c'est
un Romain » (Titre XLIV-6). Il en est de même dans la loi des Burgondes
(document 12).
La population était donc divisée en une multitude d’ethnies qui fonctionnaient
avec un système de personnalité des lois.
Il est important de noter, que lors de cette phase de personnalité des lois,
la source de droit prédominante était la loi. Mais il va débuter, avec la dynastie
carolingienne, un processus d’uni cation notamment sur le plan religieux et
juridique qui va permettre la création de nouvelles sources du droit.
B) Une union religieuse et juridique du peuple
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