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Notes de cours

Géopolitique de la Chine

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Cours riche et complet sur la Chine, analysant point par point les différents paramètres de leur puissance mais aussi ses travers et les défis auxquels l'Empire du Milieu est confronté. Cours rédigé et illustré.

Aperçu 3 sur 25  pages

  • 16 mai 2022
  • 25
  • 2021/2022
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Histoire-Géo-Géopolitique
M. DURAND


Lycée du Parc – ECS – 921* – 2021/2022

À nouveau « Empire du Milieu » ?

La Chine

Introduction :

La centralité de la Chine est essentielle pour la civilisation chinoise. Zhöngguó, auquel les Occidentaux prêtent la
traduction d’« Empire du Milieu », signifie en réalité « centre du monde ». L’empire chinois s’est toujours considéré
comme le centre du monde habité, entouré de milieux hostiles : steppe de Mongolie, océans, jungle indochinoise,
montagnes du Tibet, dans lesquels ne peuvent vivre que des peuples barbares, qui ne peuvent être qu’ennemis ou vassaux.

Forte de cette civilisation (technologie, économie, culture), elle ne pouvait porter que cette idée de centralité, avec une
domination sur tout son espace (mais pas ailleurs, même si l’on peut penser à l’explorateur chinois Zeng H e). Le pays
a connu un profond déclin, marqué par le “siècle de la honte” (1842-1949), qui en faisant perdre l’unité, fait perdre la
capacité à exprimer la supériorité de la Chine.


Point de leçon
La Grande Divergence, Kenneth Pomeranz

À ce titre, K enneth Pom eranz analyse le déclin chinois au miroir du britannique à l’heure de la première
révolution industrielle. Kenneth Pomeranz s’intéresse aux raisons qui ont permis le décollage (« take off » selon
les mots de R ostow ) du Royaume-Uni dans l’économie mondiale, au détriment d’une Chine pourtant favorite
au départ, et qui a connu un large déclin courant XIXème.

Il compare par équivalence l’Empire Britannique et la province du delta du Yangtze en Chine au XVIIIème.
L’écart ne se fait pas d’une grande erreur de la Chine ou du génie britannique : la seule raison visible soutient
que le Royaume-Uni prend ses ressources ailleurs alors que la Chine, pas plus en retard technologiquement que
son concurrent, dépasse son « indice écologique » (trop de ressources exploitées de son territoire).

Le Royaume-Uni a su dépasser des limites sur lesquelles les autres pays ont buté : la manque de charbon,
essentiel pour la machine à vapeur et la production d’énergie, n’a pas été un problème pour les Britanniques,
qui vivaient au-dessus de gisements suffisants. Le Royaume-Uni jouit donc d’une chance géographique. La Chine
avait du charbon aussi, en a toujours, mais les régions richement dotées sont mal connectées aux centres proto-
industriels chinois.

De plus, si le Royaume-Uni n’avait pas été une puissance coloniale, le climat n’aurait pas permis la culture de
coton, essentielle pour la filière du textile, à la base de l’essor capitaliste du pays. La culture de coton ne pèse
donc pas sur le milieu agricole britannique : l’Angleterre a réussi à déterritoriser son impasse économique, avec
une externalisation du coton par la conquête coloniale. Au contraire, les Chinois font avec leur agriculture.


En 1949, il y a la volonté du rebond est portée par les communistes au pouvoir.

,La question est de savoir si la Chine est de nouveau Empire du milieu, au centre du monde et au cœur d’un nouvel ordre
mondial. A l’éventuel ordre mondial successif à la Guerre Froide succèderait un éventuel ordre mondial organisé par les
Chinois. La Chine a-t-elle des velléités d’organiser le monde ? Quels sont ces objectifs à l’échelle mondiale ? L’Empire
chinois n’avait pas cette ambition, il restait dans son monde, suffisamment grand.

Le retour de la C hine était, sinon prévu, en tout cas dans la nature des choses . De ce point de vue, A lain
Peyrefitte reprenait en 1973 une expression de N apoléon : « Quand la C hine s’éveillera, le m onde trem blera . »
D e G aulle avait reconnu la Chine en espérant, en 1964, que Paris tirerait des bénéfices de cet acte « révolutionnaire » ;
mais le basculement dans la Révolution culturelle a balayé ces intentions. La révolution opérée par le régime lui-même
a par la suite surpris.



I. Le « paradigm e de la C hin e » ou les fondam entaux de puissance
chinoise.

L’espace et la population sont essentiels à la puissance chinoise. Pour Pierre G entelle, géographe, “le paradigme de la
Chine tient en peu de mots : beaucoup d’espace, beaucoup de gens, beaucoup de temps.” Les pouvoirs chinois ont toujours
eu conscience qu’à long-terme, les fondam entaux que sont l’espace et la population, qui ont toujours fait la
C hine, la m èneraient à la puissance . Cela correspond à la critique de Paul K rugm an sur le miracle asiatique dans
La mondialisation n’est pas coupable : beaucoup plus “de transpiration que d’inspiration ”.

L’évolution économique de la Chine est cependant extraordinaire. La croissance est exceptionnelle depuis les 2000’s, avec
des taux de croissance supérieurs à 10% (à 8% depuis les 1980’s). La Chine maoïste, malgré des crises terribles (les
millions de morts de la révolution culturelle, du « bond en avant » qui se voulait être un « saut » vers la modernité mais
qui a entraîné d’énormes famines), a elle-même connu des taux supérieurs à 5-6%. Jam ais un pays n’avait eu un e
croissance aussi soutenu e sur une période aussi longue : cela fait donc 60 ans d’une croissance impressionnante,
avec des à-coups politiques terribles dans les 1960-70’s, qui s’est affirmée progressivement à partir de 1990 et 2000. La
Chine se retrouve donc tout en haut du classement. Et cela s’étend à tout le territoire : en 2012, 31 des 32 taux de
croissance les plus importants étaient ceux des régions chinoises. Le littoral en concentre l’essentiel (14% de la superficie,
43% de la population, 62% du PIB, 86% des IDE, 93% des exportations). Les inégalités sociales se développent en
parallèle à cette croissance.

Face à cette montée en puissance de l’économie chinoise, on a une double attitude.
▪ L’idée est que la Chine constitue un défi inédit pour l’Occident ; c’est le scénario de l’arrivée au sommet de la
hiérarchie mondiale d’une puissance qui est toujours communiste. On a cette figure saisissante d’une domination
chinoise gênante, celle d’un capitalisme de la concurrence la plus effrénée, fondé sur l’oppression des travailleurs,
avec une concurrence qui se joue à l’échelle mondiale – “le capitalism e d’apocalypse ” de M arx, qui serait la
tombe des idéaux libéraux occidentaux – c’est une figure que soulignait A lain M inc dans Le monde qui vient :
il voyait dans la Chine nouvelle la perspective terrible de cet avenir. Edouard M artin disait, face à cette
menace de ce capitalisme chinois qui ferait advenir une loi du plus fort : « Si on n'essaie pas de résister
aux règles de la m ondialisation, autant ferm er l'usine France ».

▪ La deuxième attitude est de jouer les prophètes de malheur, et que cette nouvelle incarnation du “péril jaune”
va péricliter. Cette perspective est régulièrement annoncée, à cause de problèmes variés (SIDA, grippe aviaire,
pollution) plus ou moins valides que la Chine n’arriverait pas à surmonter. Jusqu’à présent, le régime a surmonté
ces problèmes. Le pilotage politique et économique de ce régime qui se veut “scientifique” s’est avéré
particulièrement efficace jusque-là. Les prophètes ont sous-estimé la capacité d'adaptation du pouvoir.

Philippe C ohen et Luc R ichard, La Chine sera-t-elle notre cauchemar ? Le vampire du milieu.
Izraelew icz L'arrogance chinoise.




A . U n État continent ou le théâtre d’une m ontée en puissance récurrente :
singularités, contraintes, et am énités d’un territoire.

, 1. U n linéaire considérable, trois grands dom aines économ iques, un jeu de
barrières et de paliers.

La Chine est très vaste. Elle est le 3ème plus grand État du monde (9,8 millions de km2), à peine moins que l’Europe,
avec plus de 5000 km N-S et E-O, et 5 fuseaux horaires. Le territoire chinois s’est construit de manière évolutive à partir
de l’expansion des Hans (auto-limitée) puis des Ming (XIV-XVIIe) jusqu’aux Qing. Les revendications territoriales
chinoises vis-à-vis de certains de ses 15 voisins (frontière continentale avec l’Inde ; frontières maritimes ; question
taïwanaise) visent à refonder, justement, ces frontières de l’empire.

L’espace s’organise d’Est en Ouest en 3 portions. Le monde de l’Himalaya au Nord et au N-E (1,8 millions de km2 à
plus de 5000m et 3,4 millions à plus de 2000m) est marqué par le froid et la sécheresse et ne regroupe que 6% de la
population, mais est primordial car source des grands fleuves irriguant et organisant l’espace des plaines. Sur 4 millions
de km2 s’étalent les hauts plateaux du Sud-Ouest (Tibet). La Mongolie intérieure et la Mandchourie, contraintes par un
climat continental, sont avec le Tibet la Chine périphérique. La Chine “utile” et dynamique est celle des moussons, la
Chine centrale et orientale des plaines et du littoral.

Il y a une limite à la capacité chinoise à devenir une puissance maritime. La puissance américaine est une puissance
navale de projection qui pourrait suppléer une puissance chinoise pas à même de contrôler les mers malgré une stratégie
du collier de perles marqueur d'une propre logique stratégique.



2. U n territoire m arqué par l’im portance ou l’absence d’eau.

La Chine est partagée entre aridité et humidité. 11 grands fleuves irriguent les plaines, dont 3 principaux (le Huang He,
le Yangtze et le Xi Jiang) qui peuvent se révéler dangereux (grands travaux sur le Huang He depuis 1947 pour éviter les
inondations). Ce sont des fleuves qui apportent beaucoup de limons et dont les berges se sont peu à peu élevées au-
dessus de leurs plaines. Le débordement de ces derniers prend donc des ampleurs conséquentes. Ils fixent les littoraux
mais aussi, désormais, des réalités urbaines intérieures importantes.

La C hine form e plus d'ingénieurs que l'Europe, les États -U nis et le Japon réunis, m ais elle sait les tenir
occupés. Après avoir barré le Yangzi avec le plus grand barrage de la planète et posé une ligne de chemin de fer sur le
toit du monde (Pékin-Lhassa, qui dépasse les 5 000 mètres d’altitude), elle s'attaque à un troisième défi, aussi épique
que colossal : creuser trois fleuves artificiels pour étancher la soif de 400 millions de Chinois et alimenter le Nord aride,
des confins du Xinjiang jusqu'en Mandchourie. Dépourvue de fleuve et de pluie, la capitale pompe frénétiquement dans
la nappe phréatique pour survivre, comme beaucoup d'autres agglomérations. Le niveau baisse de 2 à 3 cm par an, avec
un double risque d'affaissement et de pénurie, pour les hommes comme pour l'industrie et les cultures. Le nord de la
C hine se transform e peu à peu en cuvette de poussière infertile .

La désertification est un des plus grands défis de la Chine, car elle impacte directement la capitale, non loin des dunes
de Gobi. Lorsque le vent souffle, le sable est arraché du sol et s’abat en nuées sur Pékin, dont l’air est ainsi rendu
irrespirable (ce sont les vents de sable). Les avancées du désert rongent les terres agricoles et entraîne la migration
forcée de centaines de milliers de Chinois.



3. Les risques naturels.

C’est aussi une zone de catastrophes. La Chine lutte pour l’eau et contre elle : le N-E et le Nord (occupés par le désert
de Gobi notamment) en manquent (8% des ressources en eau, 40% des terres arables et 35% de la population). C’est
pourquoi le gouvernement met en place une politique active de l’eau.

Les inondations sont monnaie courante, notamment sur le fleuve jaune (Huang He). Les séismes ont des conséquences
souvent importantes. La Chine orientale, la plus touchée, concentrant 80% de la population, les catastrophes ont un
effet souvent plus spectaculaire et catastrophique qu’ailleurs. La concentration des hommes sur les littoraux et dans les
métropoles implique des effets d’entraînement et d’augmentation du nombre de victimes lors de catastrophes (260 000
morts en 1976, 50 000 en 2008 au Sichuan).

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