CHAPITRE 6 : Quels sont les caractéristiques contemporaines et les facteurs de la mobilité sociale?
Mobilité sociale : la circulation des individus entre les différentes positions de la hiérarchie sociale.
- Intragénérationnelle : au cours de la vie d’un individu:
→ Géographique : changer de lieu de résidence.
→ Professionnelle : changer de professions ou d’état d’activité au cours de sa vie.
⇒ Peut permettre à un individu de changer de groupe social et ainsi réduire les inégalités.
- Intergénérationnelle : comparaison de la situation sociale d’un individu par rapport à celle de ses
parents, la plus ou moins grande hérédité des positions sociales, mesurée par des tables de
mobilité en utilisant la PCS des individus et de leurs parents.
1 - Les Tables de mobilité
A) Construction et intérêts
L’Insee, à travers des enquêtes Formation, Qualification Professionnelle (FQP) interroge plusieurs millions
d’individus, âgés de 30 à 59 ans (pour éviter les situations compliquées de début et de fin de carrière) sur
leur profession et celle de leurs parents (autrefois uniquement les hommes et les professions de leur
pères). Ces enquêtes permettent à l’Insee de récolter un grand nombre de données brutes qu’il peut
ensuite présenter sous différentes formes, d’abord sous la forme d’une tableau à double entrée avec les
effectifs des pères et des fils dans des tables en fonction des différentes PCS, soit sous forme de tables de
mobilité, en pourcentage.
- Tables de destinées sociales : “Que deviennent les fils de telle ou telle PCS?”
- Tables de recrutement (ou d’origine) : “D’où viennent les fils appartenant à telle ou telle PCS?”
Ces tables de mobilité permettent de mesurer et d’analyser la mobilité observée (= ensemble des flux de
mobilité) à la fois verticale (ascension sociale, déclassement), non verticale (de statut ou horizontale) et
reproduction sociale. Elles permettent également la comparaison de la mobilité sociale entre deux époques
données et enfin, depuis peu, elles permettent la comparaison entre la mobilité féminine et la mobilité
masculine.
B) Les limites des tables de mobilité
● Les personnes enquêtées ne représentent pas tout la population:
○ Les tables de mobilité n’ont longtemps concerné que les hommes;
○ L’échantillon est celui des actifs occupés ou anciens actif occupés et ne tient donc pas
compte des chômeurs alors qu’ils peuvent être en situation de déclassement par rapport à
leurs parents si ces derniers n’étaient pas chômeurs;
○ Les tables de mobilité ne définissent la mobilité sociale que par rapport à la profession, or
on pourrait penser à d’autres critères tels que le fait d’être propriétaire ou locataire de son
logement.
● Les tables de mobilité posent des problèmes au niveau des PCS utilisées:
○ Elles ne tiennent pas compte du statut de l’emploi occupé: par exemple un homme
technicien en CDD a connu une forme de déclassement par rapport à son père qui était
technicien en CDI mais son cas n’est pas visible dans les tables de mobilité;
○ Il existe des écarts de prestige important au sein des PCS: un fils de professeur qui est
devenu médecin a connu une ascension sociale mais aux yeux des tables de mobilité, il
demeure dans la même PCS et n'as donc pas connu de mobilité;
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, ○ Le prestige social de certaines professions peut évoluer : le prestige social des professeur
n’est pas le même aujourd’hui qu’il y a quelques années, ainsi un fils de professeur
devenant professeur a connu une forme de déclassement invisible dans les tables de
mobilité.
○ Enfin, le nombre de PCS retenues influence la mesure de la mobilité, plus il y a des PCS,
plus on observe de mobilité.
2 - Comment interpréter la mobilité observée
Mobilité observée : total des individus qui ont changé de PCS par rapport à leur père. Se mesure avec le taux de
mobilité, c’est-à-dire le rapport entre le nombre d’individus mobiles et le nombre total d'individus (multiplié par
100). On observe qu’environ 64% des hommes aujourd’hui sont mobiles.
A) La place de la mobilité structurelle
Mobilité structurelle : c’est l’ensemble des changements de position sociale qui sont dûs aux changements
de la structure économique et sociale. Cette forme de mobilité est rendue nécessaire par les changements
de la structure socioprofessionnelle entre la génération des parents et celle des enfants.
En effet, certaines PCS ont connu un essor et d’autres une régression. La tertiarisation entamée durant les
Trentes Glorieuses à d’une part favorisé l’essor de métiers de cadres et professions intellectuelles
supérieures et de professions intermédiaires, tandis qu’elle a participé au déclin du nombre d’agriculteurs
exploitants (s’expliquant par l’augmentation de la taille des exploitation, et les gains de productivité dus au
progrès technique qui ont réduit les besoins en main d’oeuvre) et à la baisse du nombre d’ouvriers (gains
de productivités grâce au progrès technique qui fait diminuer les besoins en main d’oeuvre et la
désindustrialisation du pays). Ainsi, du fait de ces évolutions, tous les enfants d’ouvriers et d’agriculteurs,
même s’ils l’avaient souhaité, ,n’auraient pu faire le même métier que leur père puisque le nombre de ces
emplois avait diminué. De la même manière, tous les enfants de cadres ne suffisaient pas à remplir les
postes de cadres disponibles (même chose pour les professions intermédiaires), créant un appel d’air,
favorisant l’accès à ses professions des enfants issus d’autres PCS: c’est la mobilité structurelle. Ainsi, la
mobilité observée s’explique en partie par la mobilité structurelle, c’est-à-dire la mobilité minimale
imposée par l’évolution de la structure de l’emploi entre 2 générations. La différence entre la mobilité
observée et la mobilité structurelle s’appelle la mobilité nette. Cependant, il est difficile de clairement
distinguer la part de mobilité structurelle au sein de la mobilité observée. Ainsi, la mesure de la mobilité
observée ne permet pas toujours de savoir s’il s’agît de mobilité contrainte ou de l’amélioration de l’égalité
d’accès aux différentes positions sociales.
B) Une société mobile n’est pas nécessairement une société plus fluide
La fluidité sociale désigne la situation dans laquelle la position sociale d’un individu ne dépend pas de son
origine sociale, on la mesure par des rapports de chances (odds ratio), on parle aussi d’égalité des chances.
Pour qu’il y ait fluidité sociale il faut qu’il y ait mobilité sociale. Si l’on veut que des filles d’employées aient
les mêmes chances de devenir cadres que les filles de cadres, il faut qu'une partie d’entre elles accomplisse
cette trajectoire sociale. Cette condition est bel et bien nécessaire mais elle n’est pas suffisante: si au cours
du temps deux fois plus de filles d’employées deviennent cadres (augmentation de la mobilité sociale) et
que parallèlement 4 fois plus de filles de cadres deviennent cadres à leur tour, l’inégalité des chances entre
les deux groupes s’est accrue et la fluidité sociale a diminué.
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