,Table des matières
Nationalisme ouvert et nationalisme fermé ..........................................................................3
Le nationalisme républicain .......................................................................................................... 4
Le nationalisme conservateur ....................................................................................................... 7
Le moment Dreyfus ....................................................................................................................... 8
L'Union sacrée ............................................................................................................................. 11
Déclin et contradictions .............................................................................................................. 16
Révolution nationale et France libre ........................................................................................... 18
Métamorphoses .......................................................................................................................... 21
Nationalisme ouvert, nationalisme fermé ................................................................................... 22
Notes ...................................................................................................................................25
M Winock Nationalisme ouvert et fermé 2
, Nationalisme ouvert et nationalisme fermé
Au lendemain des élections législatives de 1902, qui ont été remportées par le Bloc des
gauches, Charles Péguy écrit, dans les Cahiers de la Quinzaine :
« Les élections ont prouvé que la poussée nationaliste est beaucoup plus compacte,
beaucoup plus dense, beaucoup plus serrée, beaucoup plus carrée qu'on ne s'y attendait. Les
querelles individuelles des principaux antisémites et des principaux nationalistes ne peuvent
nous masquer le danger antisémite et nationaliste. Au contraire, si les partis nationalistes,
aussi mal conduits par des chefs rivaux, ont obtenu pourtant les résultats que nous
connaissons, qui ne voit qu'il faut que ces partis aient à leur service des passions compactes
dans des masses compactes. On ne fabrique pas par stratagème, artifice, des mouvements
aussi étendus, aussi profonds, aussi durables »
Ce mot nationaliste, que l'on trouve sous la plume d'un écrivain qualifié lui-même, une
dizaine d'années plus tard, de « nationaliste », est d'usage récent. Les dictionnaires donnent
l'année 1798 comme date de son apparition, mais tout au long du XIXe siècle, il n'est qu'un
mot savant et oublié, que Littré ignore dans son grand dictionnaire élaboré sous le Second
Empire. C'est dans les dix dernières années du siècle que cet adjectif -et le substantif qui lui
est lié -va servir à désigner une tendance politique que l'on classe nettement à droite, et même
à l'extrême droite. Son introduction semble être redevable à un article de Maurice Barrès,
dans Le Figaro, en 1892
Au demeurant, dans notre langage, les mots « nationalisme » et « nationaliste » sont
ambivalents. Le même terme, en effet, sert à caractériser deux mouvements historiques, tant
successifs, tant simultanés. D'abord, le nationalisme des peuples qui aspirent à la création
d'un État-nation souverain -c'est ce qu'on appelle aussi parfois le mouvement nationalitaire,
dont l'aboutissement en Europe a correspondu aux traités qui concluent la Première Guerre
mondiale et achèvent la destruction des grands empires ; au XXe siècle, ce mouvement
nationalitaire, qu'on appellera désormais nationaliste, est principalement le fait des peuples
colonisés: l'accès à l'indépendance des États du « tiers monde » en a été le résultat. Cependant,
le même mot nationalisme est pratiqué, depuis l'affaire Dreyfus surtout, pour étiqueter les
diverses doctrines qui, dans un État constitué, subordonnent tout aux intérêts exclusifs de la
nation, de l'Etat-nation, à sa force, à sa puissance, à sa grandeur.
En principe, la France n'a pu connaître que ce nationalisme du second type, puisque, depuis
longtemps, son unité et sa souveraineté étaient acquises. Mais la réalité n'est pas si simple,
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