Le référendum pour l’indépendance de la Catalogne qui secoue l’Espagne depuis
quelques semaines se trouve être pleinement en lien avec le sujet proposé ici, et rouvre la
question toujours d’actualité de savoir en quelle mesure les Etats représentent effectivement
les différentes nations, et amène ainsi à une réflexion autour du concept d’Etat-nation. On
peut définir l’Etat comme un ordre politique et juridique plus ou moins centralisé, qui est
organisé et institutionnalisé. L’Etat est une personne morale de droit public qui exerce son
autorité sur une population et un territoire déterminé, et ce au nom de la volonté collective
dont il est le représentant. Il est donc à la fois souverain et directement soumis au droit
international. Quant à la nation, elle est définie comme un groupement humain lié à la fois
par des critères objectifs tels que la langue, la géographie ou la religion ; ainsi que des
critères subjectifs comme une histoire commune ou le désir de « vivre-ensemble ». Ce thème
nous permet de réfléchir sur les liens possibles entre la nation et l’état, et nous appelle ainsi
à réfléchir plus généralement sur la place qu’occupent ces deux concepts dans la
construction de nos sociétés actuelles. Il convient donc de poser la question suivante. Quels
sont les liens observables entre l’existence de l’état et l’existence de la nation ? Nous
expliquerons tout d’abord en quoi il existe une double dépendance entre l’état et la nation,
ce qui formera la première partie (I). Ensuite, nous exposerons les limites à cette association
dans une deuxième partie (II).
I/ L’Etat et la Nation, entités indissociables
A la lecture des documents, il apparait rapidement qu’une double relation existe
entre Etat et nation. Si l’Etat ne peut réellement exister sans nation à son origine, la nation a
besoin d’un état pour s’organiser et se diriger soi-même.
A) L’existence de l’Etat dépendante de la Nation
Selon la théorie traditionnelle de l’état, trois éléments sont désignés comme constitutifs de
l’état : une nation, un territoire et un pouvoir coercitif. Théorie répandue et largement
admise par tous, Carré de Malberg la détaille dans son livre Contribution à la théorie
générale de l’état de 1922. (Document 1) Il parle notamment de la nation comme «
substance humaine de l’état ». Ainsi, l’état ne pourrait exister sans groupement humain à son
origine. De plus, la nation, empreinte d’un désir de vivre-ensemble et d’une « grande
solidarité » selon Renan, formule utilisée dans son discours Qu’est-ce qu’une nation ? de
1882, est indispensable à l’état, qui ne peut pas fonctionner sans cette volonté d’avancer
ensemble. La nation étant, selon lui, « un plébiscite de tous les jours », elle doit sans cesse
être réaffirmée par le peuple, qui peut à tout moment s’en défaire et ainsi mettre en péril
l’existence de l’état. Sans peuple uni, l’état deviendrait un état failli et illégitime. Enfin, en
1789, l’article 3 de la DDHC formule que « le principe de souveraineté réside essentiellement
dans la nation ». Cet article a consacré la nation comme la source des différents pouvoirs
étatiques. De ce fait, l’état est clairement dépendant d’une nation unie qui désire continuer à
vivre-ensemble ; sans cela, son bon fonctionnement et sa légitimité seraient remis en cause.
D’autre part, il semble également nécessaire à la nation de s’organiser à travers un état pour
pouvoir exercer sa volonté propre, et être indépendant.
B) La nécessité pour la Nation de former un Etat
