Explication linéaire n°2
Spleen - Les Fleurs du mal de Baudelaire
“Spleen” de Baudelaire (LXXVIII)
1 Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
Sur l'esprit gémissant en proie aux longs ennuis,
Et que de l'horizon embrassant tout le cercle
II nous verse un jour noir plus triste que les nuits;
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Quand la terre est changée en un cachot humide,
Où l'Espérance, comme une chauve-souris,
S'en va battant les murs de son aile timide
Et se cognant la tête à des plafonds pourris;
10 Quand la pluie étalant ses immenses traînées
D'une vaste prison imite les barreaux,
Et qu'un peuple muet d'infâmes araignées
Vient tendre ses filets au fond de nos cerveaux,
Des cloches tout à coup sautent avec furie
15 Et lancent vers le ciel un affreux hurlement,
Ainsi que des esprits errants et sans patrie
Qui se mettent à geindre opiniâtrement.
- Et de longs corbillards, sans tambours ni musique,
Défilent lentement dans mon âme; l'Espoir,
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Vaincu, pleure, et l'Angoisse atroce, despotique,
Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.
Charles Baudelaire
Introduction
Baudelaire = XIXe siècle / pas de mouvement / a inspiré des symbolistes et des surréalistes /
s’inspire du romantisme noir / enfance difficile = inspiration pour ses poèmes
Les fleurs du mal = 1857 et 1861 (poèmes jugés choquants) / 6 sections = parcours d’une âme
Spleen : mot anglais qui signifie mélancolie, un état de tristesse profonde vis-à-vis de la vie
DANS LE POEME : section spleen et idéal / lecteur découvre monde oppressant, où désespoir
prend le dessus sur joie de vivre
Comment le narrateur se retrouve-t-il affecté par son propre spleen ?
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, I. Introduction du Spleen (montée de la crise intérieure)
Ligne 1 ● premier quatrain développe une seule phrase qui progresse avec une
subordonnée en « quand » -> donne sentiment d’attente de la proposition
principale au lecteur
● « ciel bas et lourd pèse comme un couvercle » : comparaison qui instaure
une ambiance angoissante, impression que le ciel emprisonne la terre
comme dans une boîte
● « Pèse » = climat pesant, un accent irrégulier tombe sur "pèse" ;
compression exercée sur l’individu, idée de poids du ciel, comme si ce
dernier était palpable, matériel -> ce qui renforce l’idée d’une ambiance
angoissante
● “quand” -> temporalité du spleen
Ligne ● L’enjambement du vers 2 précise la personne concernée par
2 « l’emprisonnement »
● coordinations "et qui" + enjambements continuels -> donnent l'impression
d'un mouvement lent et enchaîné inexorablement
● « sur l’esprit » : synecdoque donne une impression d’emprisonnement
ressentie par un seul individu qui est caractérisé ici comme un « esprit
gémissant aux longs ennuis » :
● « les longs ennuis » = l’ennui de l’existence, l’individu est las de la vie,
● le terme « gémissant » renforce la lassitude
● « proie » = soumission de l’homme
Baudelaire donne ici les impressions ressenties par la victime du spleen, celles-ci
sont pesantes, douloureuses, de plus en plus malsaines et de plus en plus
inquiétantes.
Prison est d’abord extérieure au poète touché par le spleen, puis elle finit par
devenir intérieure -> montée de la crise avant son paroxysme et la défaite finale de
l'esprit
Ligne ● Reprise de «Quand» avec la conjonction de subordination «que», on peut
3 s’attendre à un supplément d’informations MAIS elles restent très vagues,
dans le but de laisser le lecteur dans l’expectative, et/ou dans un flou
spatial —> suspense
● “Horizon embrassant tout le cercle”= figure de style met en relief
l’étrangeté du paysage (Horizon généralement linéaire) = le cercle
symbolise l’enfermement et l’absence de repères
Ligne ● Oxymore “un jour noir” même les jours, termes à connotation positive sont
4 décrits comme sombres —> il n’y a VRAIMENT plus d’espoir
● « plus triste que » hyperbole, comparative des jours et des nuits, termes
péjoratifs, le poète dépeint un univers pessimiste
● Terme “nous” intègre le poète et le lecteur dans le même groupe —> aussi
marque d’énonciation servant au réalisme du poème
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