ORIGINES SEGREGATION :
Nous allons voir ensemble les origines de la ségrégation raciale de la Guerre de Sécession à l'abolition de
l'esclavage, puis de Martin Luther King et la bataille pour les droits civiques.
L'histoire des Afro-Américains débute au 17e siècle avec les premiers bateaux européens portant des esclaves,
voire plus tôt car il semblerait que Christophe Collomb aurait emmené des Africains avec lui
GUERRE :
A l'issue de la guerre de Sécession, en 1865, l'esclavage est aboli dans le sud des États-Unis. En effet, c'est
seulement après la Seconde Guerre mondiale que les deux systèmes, Américains et Africains, ont divergé,
l'apartheid sud-africain se renforçant tandis que la ségrégation américaine s'affaiblissait. Mais les populations
noires, progressivement reléguées et exclues de la vie politique, s'y voient imposer un système légal de
ségrégation. Il durera près d'un siècle.
En 1865, pourtant, tout paraissait clair. Le Nord avait gagné la guerre. L'esclavage, par le 13e amendement, était
aboli dans l'ensemble des États-Unis. En 1866, le Congrès, par le 14e amendement, garantissait la citoyenneté des
anciens esclaves. En 1869, le 15e amendement interdisait toute remise en cause du droit de vote pour les
nouveaux citoyens.
Les anciens esclaves pouvaient désormais voter, et de nombreux hommes politiques noirs furent élus dans tous les
États du Sud - ils étaient même majoritaires en Caroline du Sud dont la population était aux deux tiers noire. Le
Mississippi envoya deux sénateurs noirs au Sénat à Washington. "Nous étions fous de joie, nous nous prenions
pour des héros. Ça y est, on était libres !" se rappelait Felix Heywood, un ancien esclave du Texas interviewé dans
les années 1902.
Mais les portes de l'espoir se refermèrent bientôt, en raison du désengagement graduel des républicains nordistes,
ainsi que du retour aux postes de pouvoir des anciens partisans de l'esclavage. Ces derniers se regroupèrent dans le
Parti démocrate, localement aidé par le Ku Klux Klan, fondé en 1866, dont les cavaliers cagoulés entendaient
reconquérir par la violence ce que la guerre et les urnes leur avaient ôté : la suprématie blanche dans le Sud.
Accompagnant la ségrégation, les lynchages se multiplièrent à partir du début des années 1890. Ils avaient été très
rares pendant l'esclavage et dans les années qui suivirent la guerre de Sécession. Le premier Ku Klux Klan des
années 1866-1872 avait eu recours au fouet, rarement au meurtre. Or, après 1890, dans les quatorze États du Sud,
près d'une centaine de personnes étaient lynchées chaque année en moyenne, dont 75 % étaient noires, un
pourcentage qui s'éleva à 90 % au XXe siècle.Renforçant les sentiments de solidarité raciale dans la population
blanche et terrorisant la population noire, ces lynchages étaient particulièrement nombreux dans les régions à
faible densité de population, avec peu de moyens de communication, et visaient surtout des Noirs pauvres, des
étrangers récemment installés ou de passage dans la région. "Les victimes sont toujours des hommes dont
personne ne pouvait prendre la défense" , expliqua benoîtement un pasteur noir de Montgomery en 1897.
C'est ainsi qu'à la ségrégation de fait qui existait dans la plupart des États du Sud s'ajouta une dimension
juridique : en Louisiane, au Mississippi, en Alabama, en Arkansas, en Géorgie, en Caroline du Nord et du Sud, en
Floride, en Virginie, la ségrégation devint légale avec le vote, entre 1890 et 1917, des lois "Jim Crow" par
référence à une chanson de 1830 moquant les Noirs.
Ces lois organisèrent la séparation sociale entre les Noirs et les Blancs. Ce fut d'abord le cas dans les transports.
Les trains, les tramways et les bateaux, puis d'autres lieux publics - jusque et y compris les toilettes -, les écoles,
les lieux de résidence et bientôt les hôpitaux, les hospices, les orphelinats. En Caroline du Sud et dans le
Mississippi, seules des infirmières noires pouvaient s'occuper de patients noirs. Le point de vue conciliant et
pragmatique de Washington n'était pas partagé par tous : beaucoup de Noirs du Sud ne cessèrent de contester le
système. Des boycotts étaient organisés contre les lignes de tramways et les commerces trop hostiles, contre les
journaux violemment racistes ; des meetings de protestation se tenaient aux risques et périls des participants.
Deux sociétés, l'une noire, l'autre blanche, se trouvaient donc séparées par un mur d'hostilité et de
méfiance : "Nous sommes voisins, et pourtant étrangers. Même entre les Blancs les plus éclairés et les Noirs, il
n'y a plus de communication, plus d'échanges de vues" , écrit un Noir de Caroline du Nord au début du
XXe siècle.
La ségrégation et la violence raciste du Sud eurent pour conséquence le départ d'une partie de la population noire
vers les grandes villes industrielles du Nord : 200 000 personnes s'y installèrent entre 1890 et 1910. Les raisons
, pour lesquelles les Noirs vont s'installer dans les villes du Nord sont donc principalement dues aux 13e et 14e
amendements de la Constitution, qui font qu'à partir de 1866, les Noirs deviennent citoyens à égalité avec les
blancs, du moins sur le papier car les Blancs du Sud avaient très vite envie de revenir sur la société esclavagiste or
les Noirs étaient libres. C'est ce qui a par la suite développer le racisme et a fait émerger le stéréotype du Noir
criminel (ex film Queen and Slim, série When they see Us ?). Le mouvement, que l'on appelle « La Grande
Migration », s'accentua à partir de la Première Guerre mondiale, lorsque l'immigration européenne se tarit. Harlem
devint alors un grand quartier noir, haut lieu de la vie culturelle afro-américaine dans les années 1920. La
perspective de salaires de 3 dollars par jour, que des agents des compagnies de Chicago ou de Detroit
spécialement dépêchés dans le Sud, des billets de train gratuits dans les poches, faisaient miroiter aux métayers
noirs, était suffisamment motivante pour plier bagage. La population noire de Chicago passa ainsi de 44 000
personnes en 1910 à 110 000 personnes en 1920, puis à 234 000 en 1930. C'est également à cette période là que le
jazz et le blues vont apparaître.
Mais, dans les villes du Nord, les morsures du racisme n'étaient pas moins douloureuses. La ségrégation n'était pas
imposée par la loi, mais elle existait de fait: on parle de racisme systémique aux Etats-Unis. Les Noirs vivaient
dans des quartiers réservés, les colored districts , occupaient les emplois les plus modestes en concurrence avec
les migrants européens, ce qui occasionnait des tensions, parfois des émeutes.
Mais le militantisme afro-américain ne faiblit pas : le mouvement pour les droits civiques naquit symboliquement
le 1er décembre 1955, lorsque Rosa Parks refusa de céder sa place dans un bus de Montgomery Alabama cf
p. 50 . Les Noirs du Sud affirmaient leur détermination : "Nous en avons assez d'être ségrégés et humiliés, assez
d'être frappés par le pied brutal de l'oppression" , s'exclama le jeune pasteur Martin Luther King dans l'une de ces
envolées lyriques qui caractérisaient cet orateur hors pair. En 1957, lui et un groupe de pasteurs créèrent la SCLC
Southern Christian League Conference, une organisation chrétienne prônant la désobéissance civile et la non-
violence "pour abattre Jim Crow" .
Le système de ségrégation entra dans son agonie à partir du début des années 1960. John Kennedy, nouvellement
élu, plus sensible que son prédécesseur aux pressions des militants des droits civiques, n'hésita pas à utiliser les
forces armées fédérales pour mettre fin aux violences exercées contre eux.
Les marches pacifiques et les sit-in se succédaient afin de forcer la main de Kennedy et d'exposer aux yeux du
monde la violence des partisans de la ségrégation, qui répondaient nuitamment par des meurtres et des attentats.
En juin 1963, le président déclara que "la race n'avait pas de place dans la vie et dans le droit du pays" . Kennedy
fut assassiné le 22 novembre, mais son successeur Lyndon Johnson poursuivit sa politique : la grande loi des
droits civiques votée en 1964 interdisait toute forme de discrimination et de ségrégation dans les lieux publics,
accordait au gouvernement de nouveaux moyens par la création d'une commission chargée de veiller à l'égalité de
tous dans le monde du travail, sans distinction de race, de religion, d'origines nationales et de sexe.
AUJOURDHUI :
La mort de George Floyd a soudainement amplifié la mobilisation contre les inégalités raciales aux Etats-Unis.
Ces inégalités, et une forme de ségrégation, subsistent en 2020; il suffit de parcourir une grande ville américaine
pour s’en rendre compte.
Pourtant, sur le papier, les noirs et les blancs sont égaux depuis l’adoption du 14e amendement de la constitution
en 1868.
Aujourd'hui les Noirs font 13% de la pop américaine