CHAPITRE 1 - LA RECONSTRUCTION ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
- Edification d’un nouvel ordre mondial :
- sur la base d’un libéralisme rénové sans cependant briser toutes les barrières cloisonnant l’économie
- partageant l’animation de l’activité économique entre :
- puissantes entreprises capitalistes
- syndicats
- pouvoirs publics
I. CONTINUITÉS ET RUPTURES DE L’APRÈS-GUERRE
- L’économie et les finances mondiales paraissent complètement désorganisées :
- la plupart des pôles naguère actifs sont sinistrés
- des relations profondément perturbées (destruction des marines marchandes…)
A. L’écart entre les pays industriels et les pays neufs
- La prédominance des pays industrialisés se maintient :
- les commandes de guerre ont même réveillé certains secteurs en crise (textile, métallurgie, chimie…)
- une étape décisive dans la connaissance et l’utilisation de l’énergie atomique
- un potentiel industriel en 1945 globalement supérieur à celui de 1939
- Les pays moins développés n’ont que partiellement comblé leur retard :
- la guerre leur a procuré des opportunités de croissance en éliminant pratiquement la concurrence
- part des pays non industrialisés dans les exportations mondiales :
- 28 % en 1937
- 35 % en 1948
- principaux bénéficiaires : dominions britanniques, Mexique, Brésil, Argentine
- mais leur situation reste le plus souvent précaire :
- en Amérique latine :
- prépondérance des activités agricoles
- situation financière dominée par le capital nord-américain et le dollar
- en Asie et en Afrique : économies soumises aux intérêts européens et japonais
B. Le reclassement des pôles dominants
- L’Europe est en grande difficulté : (matérielle, financière, économique, sociale)
→ Sans moyens de paiement internationaux (le dollar-gap), l’Europe sollicite l’aide américaine
- un recul considérable de son influence internationale :
- de 46 % à 37 % des exportations mondiales entre 1937 et 1948
- livre sterling face au dollar (1947 : échec du retour à la convertibilité externe)
- décolonisation
- Le Japon est lui sous tutelle nord-américaine :
- dissolution des grands zaibatsu
- contingentement sévère de la production industrielle, surtout l’acier
- L’URSS n’est pas en mesure de tenir le rôle économique en rapport avec sa puissance politique et militaire :
- ravages de la guerre maintenant sa production au quart de celle des Etats-Unis
- rayonnement commercial limité (pays socialistes = 3,6 % des exportations mondiales en 1948)
- retard technologique considérable
- Les Etats-Unis sont eux en position de force en 1945 :
- monopole nucléaire, techniques de pointe, méthodes de gestion les plus efficaces
- 50% production mondiale
- Contrôle des marchés internationaux : règne du dollar
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,C. Le désordre inflationniste
- Les origines diverses de l’inflation :
- la Seconde Guerre Mondiale :
- déséquilibre entre offre et demande (commandes de guerre raréfiant les autres productions)
- déficits budgétaires partiellement comblés par les Etats par la création monétaire
- importations → déficits extérieurs → endettement → dépréciation de la monnaie
- après 1945, les mécanismes inflationnistes sont entretenus :
- hausse des salaires
- charges de la reconstruction financée par le budget
- recours aux produits étrangers pour pallier les pénuries
- relancée par la guerre de Corée à l’échelle mondiale en 1950-51
- La poussée inflationniste nuit à l’effort de reconstruction :
- elle décourage l’investissement productif au profit de la spéculation
- Solutions ?
- prélèvement fiscal exceptionnel au nom de la solidarité nationale
- compression de la masse monétaire
Dur pour des sociétés déjà éprouvées par la guerre ces mesures
II. UN NOUVEL ORDRE ÉCONOMIQUE ET MONDIAL
A. Un capitalisme libéral rénové
- En 1945, ces principes libéraux coïncident avec les intérêts de l’économie américaine :
- énorme production internationale réclamant de vastes marchés extérieurs ouverts
- volonté d’être remboursés dans des monnaies qui auraient conservé l’essentiel de leur valeur
B. Le système monétaire international de Bretton Woods
- Le SMI fondé à Bretton Woods en juillet 1944 est conforme à ces principes :
- préconisant le retour rapide de la libre convertibilité des monnaies entre elles → reprise du commerce
- convertibilité du dollar sur une base de 35 dollars l’once
- régime de parités fixes entre les monnaies du système (fluctuation de +/- 1 % de la parité déclarée)
Provoque une certaine austérité financière dans certains pays pour assurer la parité
- création du FMI (Fonds Monétaire International) :
- financé par les membres proportionnellement à leur importance économique
- pouvant autoriser les dévaluations dont le taux est supérieur à 10 %
- prêtant aux pays en difficulté si rétablissement rapide des équilibres fondamentaux
C. Le GATT (General Agreement on Tariffs and Trade, 1947)
- Il constitue le second pilier de la libéralisation des relations économiques 23 pays le signent
- préconisant le désarmement douanier
- condamnation des pratiques commerciales déloyales (dumping…),
- de nombreuses dérogations et clauses de sauvegarde pour tenir compte des situations particulières
D. Le patronage de l’ONU et ses limites
- L’Administration des Nations unies pour le secours et la reconstruction (UNRRA) :
- 1 milliards de dollars, pris à charge par les Etats-Unis pour les 2/3
- 20 millions de tonnes de produits de première nécessité pour les populations sinistrées
- Pour l’ONU, la coopération économique est un facteur de développement et garantit le maintien de la paix :
- FMI, BIRD, OIT, FAO en font partie… Acquis au libéralisme
- l’ONU, un forum à vocation universelle, débattant des questions économiques
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,E. Vers un capitalisme ordonné
- Les dirigeants politiques issus de la Résistance souhaitent un libéralisme certes, mais encadré par les
pouvoirs publics avec 3 piliers assurant l’équité sociale et la croissance économique
- Trois tendances s’affirment alors de plus en plus nettement, confirmant la mutation du capitalisme :
Le triomphe de la grande entreprise :
- qui a montré son efficacité pendant la guerre
- semblant les plus apte à mobiliser sa puissance au service de la reconstruction
- une marche irréversible vers un état d’oligopoles malgré l’importance des PME
- prenant alors des traits distinctifs :
- des capitaux, un chiffre d’affaires, des effectifs plus importants
- un centre de pouvoir influençant l’investissement, la production, la vie sociale…
- des stratégies d’internationalisation qui revoient le jour après 1930
Le rôle accru de l’Etat :
- à travers les moyens classiques du contrôle de la monnaie et du budget :
- Relance keynésienne : deficit spending
- expansion ou contraction de la masse monétaire pour maîtriser la conjoncture
- l’extension en matière économique :
- 25% Produit nationale prélevé fiscalement !!!
- multiplication des nationalisations au degré d’autonomie variable :
- France : énergie, banques, assurances, moyens de transport, Renault…
- Grande-Bretagne : énergie, banques, assurances, sidérurgie
- système de planification souple en France dès 1947 (plan Monnet)
- politique d’aménagement du territoire précoce en Grande-Bretagne
- l’extension dans le domaine social :
- couverture de risques divers (maternité, maladie, accidents du travail, vieillesse…)
- Welfare State au Royaume-Uni, en France, plus limités en RFA et aux Etats-Unis
L’intervention croissante des syndicats dans la vie économique et sociale :
- effectifs et réorganisations (CGT ; AFLCIO ; TUC au RU)
- négociations avec le patronat sous l’arbitrage des pouvoirs publics : France conventions
collectives, Allemagne projets de cogestion
- sans établir une paix sociale durable (mouvements revendicatifs en France en 1947)
III. UNE RECONSTRUCTION RAPIDE MAIS IMPARFAITE
A. Le relèvement de la production
- La reconstruction s’est achevée plus rapidement que prévu initialement : main d’œuvre mobilisée
- Des délais différents selon les pays :
- Etats-Unis, une reconversion avec un simple fléchissement de la croissance de 1946 à 1949
- URSS : il faut attendre 1952 pour retrouver un niveau de consommation tolérable mais modeste
- Europe occidentale, une reconstruction rapide grâce au plan Marshall géré par l’OECE (Organisation
européenne de coopération économique, 1948) et l’UEP (Union européenne des paiements, 1950)
- Japon dès 1950 avec la Corée
B. La mise en œuvre du SMI
- Stabilisations monétaires rapides au RU, RFA, Belgique, Italie, France plus dur
- 1957 : rétablissement de la convertibilité des monnaies (prévue par Bretton Woods)
C. Le rétablissement des échanges commerciaux
- Une reprise du commerce mondial lié :
- à la remise en ordre des monnaies
- aux aménagements douaniers (GATT, OECE) : 90 % des contingentements abolis en Europe en 1957
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, - Le vieux continent retrouve un rôle moteur dans les relations économiques et financières internationales :
- 1952, une balance commerciale européenne légèrement excédentaire
- 1953, la reconstruction est considérée comme terminée, même si persistent des problèmes
D. Un système mondial toujours hétérogène
- A partir de 1947, la guerre froide radicalise l’opposition entre capitalisme libéral et socialisme dirigiste :
- l’URSS refus d’emblée de participer au nouveau SMI et d’adhérer au GATT
- l’URSS refuse le plan Marshall et le fait refuser par la Tchécoslovaquie et la Pologne
- En Europe occidentale, la méfiance envers les Etats-Unis est facilement surmontée par le consensus autour
des valeurs occidentales :
- Malgré quelques oppositions :
- leaders libéraux pour le maintien de protections douanières contre la concurrence américaine
- défense de relations privilégiées (zones franc et sterling)
- Une méthode en débat (atlantisme/européanisme), ayant pu retarder la construction européenne
- Des pays sous-développés encore moins aptes à entrer dans le système économique international :
- lutte pour l’indépendance politique
- peu d’atouts à faire valoir dans la concurrence internationale
Une reconstruction certes non totalement homogène mais ayant rétabli plus vite que prévu les circuits
économiques et financiers du monde libéral, préparant la forte croissance à venir
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